#BlackMusicMatters : une ressource essentielle dans toutes les salles de classe
février 23, 2022
Il est plus important que jamais pour les enseignants de discuter de justice sociale et d’équité en classe. Enseignants spécialisés dans d’autres matières, Darren Hamilton et Jon Corbin ont reconnu ce besoin et trouvé le moyen de parler de justice sociale avec leurs élèves en recourant à un langage commun, le hip-hop.
Les deux enseignants sont cosignataires de la nouvelle ressource de MusiCompte Pédagogie, #BlackMusicMatters: Hip-Hop & Social Justice in Canada (Hip-hop et justice sociale au Canada), qui présente aux élèves des artistes hip-hop canadiens et leur musique, tout en les invitant à participer à une réflexion critique sur une variété de thèmes liés à la justice sociale. Nous avons conversé avec Darren et Jon pour mieux comprendre la genèse de cette ressource, les raisons pour lesquelles les enseignants devraient l’intégrer à leurs cours et leurs intentions pour la suite des choses.
De gauche à droite : Darren Hamilton, Jon Corbin.
Présentez-nous #BlackMusicMatters. Pourquoi cette ressource est-elle si importante en classe aujourd’hui?
DARREN : #BlackMusicMatters est une ressource audio d’apprentissage par investigation axée sur les thèmes liés à la justice sociale que l’on retrouve dans les chansons interprétées et enregistrées par les artistes hip-hop canadiens. Nos salles de classe accueillent aujourd’hui une population diversifiée et cette ressource aide les enseignants à intégrer la diversité des perspectives culturelles en classe. Le hip-hop et, plus particulièrement, le hip-hop canadien, a toujours été sous-représenté dans les cours de musique. Les programmes d’enseignement ne reflètent donc pas la culture des élèves noirs. De plus, les élèves ne sont pas exposés à la culture noire et au rôle que joue le hip-hop dans la lutte contre les injustices sociales. L’éducation à la justice sociale est un volet important du programme éducatif, et #BlackMusicMatters permet aux enseignants d’utiliser le hip-hop pour aborder les enjeux de justice sociale dans les cours de musique et dans plusieurs autres matières.
JON : Cette ressource est nécessaire, car elle ouvre les salles de classe aux voix prônant la justice sociale qui ont été ignorées par le passé. Les messages de la mouvance Black Lives Matter sont véhiculés dans la musique hip-hop depuis les années 1980. Il est impératif que ces voix soient relayées aux élèves, qui ignorent souvent les liens profonds entre le hip-hop et la lutte pour la justice sociale.
Que devraient savoir les enseignants avant de commencer? Quels conseils ou suggestions offririez-vous aux enseignants non noirs qui souhaitent aborder cette musique pour la première fois?
DARREN : Il est important d’avoir des connaissances générales sur le hip-hop. Souvent, les enseignants n’abordent pas cette musique en classe en raison des stéréotypes, des images négatives et des idées préconçues sur la musique et la culture hip-hop. Il existe beaucoup de chansons hip-hop qui traitent expressément des enjeux de justice sociale, que l’on doit souvent à des artistes qui font face à des groupes radicalisés dans notre société. Nous encourageons les enseignants non noirs qui souhaitent aborder cette musique pour la première fois à prendre le temps d’étudier l’histoire des Noirs et les enjeux de justice sociale traités dans la musique. Il est également essentiel d’apprendre le « langage » du hip-hop pour identifier les thèmes et faciliter la conversation sur la musique.
Photo : Shauna Peddle
Pourquoi la musique et la culture hip-hop sont-elles des véhicules idéaux pour aider les élèves à comprendre les enjeux de justice sociale, particulièrement dans une perspective interdisciplinaire?
JON : Le hip-hop est un mouvement social. Il est impossible de parler du hip-hop sans discuter des facteurs qui l’ont influencé. Musicalement, il tire ses origines des DJ qui rejetaient la vogue du disco au profit de la musique funk. Du point de vue social, la pauvreté et la culture des gangs dans le New York des années 1970 ont poussé les jeunes à développer des moyens d’expression plus positifs pour faire progresser leur communauté. Aujourd’hui, le hip-hop a pris globalement une telle ampleur que c’est LA forme d’expressions artistique la plus populaire. On ne peut pas parler de hip-hop sans discuter de langage, d’organisation sociale, de composition musicale, de mode, de mondialisation, de mercantilisme et de transmission culturelle. Ce que j’entends, c’est : anglais, sociologie, musique, arts, géographie, commerce et anthropologie. Sans oublier l’histoire! Il est essentiel de comprendre les forces sociales à la base de tout mouvement aussi important que le hip-hop. On observe sous la surface une réponse vibrante aux forces systémiques qui ont marginalisé certains groupes.
Le hip-hop ne traite pas toujours de justice sociale, mais son existence même est liée à la lutte pour la justice.
-Jon CorbinDites-nous comment vous avez choisi les chansons qui sont à la base des cours. Avez-vous un attachement personnel à certaines chansons ou certains artistes?
DARREN : Il était important pour nous de choisir des chansons représentant différentes périodes de l’histoire du hip-hop canadien et d’aborder un vaste éventail d’enjeux et de thèmes. Puisque le hip-hop a longtemps été dominé par des artistes masculins, nous avons consciemment inclus des chansons créées par des femmes, afin de faire entendre leurs voix, leurs perspectives et de traiter les questions qui les touchent.
J’ai un attachement personnel à la pièce Africville de Black Union. J’ai entendu cette chanson quelques années après avoir visité le musée Africville à l’été 2018. Même si je suis né et j’ai fait mes études au Canada, cette visite fut mon premier contact avec l’histoire d’Africville. Africville est une chanson forte parce qu’elle sensibilise aux injustices sociales auxquelles ont été confrontés les résidents des communautés noires. C’est un aspect important de l’histoire des Noirs au Canada que l’on devrait enseigner aux élèves d’aujourd’hui.
Comme ces questions devraient être discutées et enseignées à l’année, planifiez-vous de poursuivre le développement de la ressource?
JON: Oh, à 100 %. L’élaboration de ce projet m’a appris que les Canadiens ont besoin d’approfondir l’histoire du hip-hop dans notre propre pays. Il y a beaucoup de failles dans nos perceptions, des choses que j’ignorais et des choses qu’on ne m’a jamais appris à remettre en question. Je veux que #BlackMusicMatters examine l’histoire du hip-hop dans ce pays et de la lutte pour la reconnaissance qu’ont dû livrer plusieurs pionniers de la scène hip-hop. Je veux que les élèves entendent des entrevues avec une variété d’artistes hip-hop canadiens pour qu’ils s’ouvrent à différentes perspectives sur la justice sociale dans ce pays. Je veux que cette ressource illumine l’immense richesse des artistes hip-hop de la scène underground canadienne. Nous allons sans aucun doute développer encore la ressource.
#BlackMusicMatters: Hip-Hop & Social Justice in Canada
#BlackMusicMatters: Hip-Hop & Social Justice in Canada (Hip-hop et justice sociale au Canada) est une ressource audio d’apprentissage par investigation destinée aux élèves de 12 à 17 ans. Elle a été conçue pour les enseignants de diverses matières qui souhaitent présenter la culture, l’histoire et la créativité des Noirs à travers le prisme du hip-hop.
Écoutez l’intervention de Darren lors de l’assemblée publique Décoloniser la salle de musique
La pandémie de COVID-10 et le soulèvement mondial actuel contre la suprématie blanche font que nous nous devons de reconsidérer nos façons de faire dans l’enseignement de la musique. Cette séance de discussion a permis de rassembler différentes perspectives à ce sujet à travers le Canada, et a incité les participants à réimaginer et à réexaminer de façon critique les fondements de notre pratique.
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